Galaxie 123 by Collectif

Galaxie 123 by Collectif

Auteur:Collectif
La langue: fra
Format: epub
Publié: 2014-04-13T04:00:00+00:00


Carioca Jones vint me voir le jour qui suivit l’incident de la loutre. Quand on m’annonça qu’elle était là, elle avait déjà cuisiné Dave et s’appuyait contre l’enclos spécial avec des airs de propriétaire.

« Hello, Joe chéri ! Votre homme m’a dit que c’étaient mes animaux. »

— « C’est exact. Un beau groupe. Je les ai choisis moi-même. »

— « Mais ne sont-ils pas un peu bigarrés, Joe chéri ? » Ses yeux noirs scrutaient le minuscule troupeau de reptiles. « Vous ne voudriez pas faire porter à Carioca Jones des vêtements bariolés, n’est-ce pas ? »

— « Je vous l’ai dit. Il faut qu’ils s’habituent les uns aux autres. »

— « Ah, mon Dieu, ils ne sont pas comme nous, hein ? Je veux dire, nous nous sommes entendus immédiatement, n’est-ce pas ? Je pense que vous l’avez senti aussi, n’est-ce pas, Joe ? »

— « Bien sûr. Écoutez… Carioca… j’ai malheureusement un travail fou sur les bras…»

— « Mais je comprends ! Je ne reste qu’une minute, Joe. Je pensais que nous pourrions prendre les mesures. »

L’un des Prisonniers de Droit Commun traînait par là, balayant ou se livrant à contrecœur à une tâche quelconque comme le font les hommes non attachés lorsqu’ils me voient arriver, et il me jeta un regard acéré. Carioca avait ouvert une bourse minuscule et tenait par l’extrémité un centimètre de couturière, que je regardai comme j’aurais regardé un crotale. Elle souriait d’un air entendu. Ce damné centimètre était devenu presque symbolique.

Je l’emmenai donc dans la maison et, sans chaperon, procédai aux… mensurations, veux-je dire. Je ne pense pas qu’elle ait escompté quoi que ce soit d’autre. Elle avait seulement le chic pour donner à tout ce qu’elle faisait un parfum de sexualité, raison pour laquelle sa carrière avait été si brillante et pourquoi elle était terminée, maintenant que la fleur s’était fanée. Triste ? C’était presque pitoyable, je lui donnai un bref baiser en guise de compliment forcé et la raccompagnai à l’extérieur.

« Alors, voyons, ce n’était pas si terrible, n’est-ce pas, Joe ? »

— « Hmm. »

— « Je vous laisse tranquille, maintenant. Il faut que j’aille en ville faire des courses. Je me demandais… aimeriez-vous m’accompagner ? Cela vous ferait du bien de vous éloigner un moment de ce vieil élevage puant. Hein, Joe ? Nous pourrions peut-être prendre un verre quelque part. »

Elle avait abandonné son attitude exagérément accentuée, elle avait abandonné la coquetterie, elle essayait soudain sincèrement de communiquer avec moi. Elle se sentait seule et voulait de la compagnie pour le reste de l’après-midi. Je me demandais ce qui lui arrivait, quand je me rappelai l’épisode de l’orchestrella.

« Où est Joanne ? » demandai-je. Je n’avais pas voulu le dire, mais il fallait que je sache. Sa réponse pourrait expliquer quelque chose. J’avais vu juste. Elle détourna les yeux.

— « À la maison, » dit-elle.

Il y avait donc eu une rupture ; c’était peu surprenant après l’incident de l’orchestrella. Je me demandais si Joanne était en train de faire ses bagages pour partir, et je crois que je me sentis seul, moi aussi.



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